Idriss KATHRADA, président de la Commission Développement Durable de la Fédération CINOV s’est prêté au jeu des questions/réponses sur le sujet de la RE2020.

L’Etat a lancé une concertation sur la future réglementation environnementale des bâtiments (RE 2020) organisée par le Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique (CSCEE). Quels sont les principaux enjeux de la RE 2020 ?

Le lancement de la consultation par l’Etat sur la future réglementation environnementale bâtiment (RE2020) est une bonne nouvelle. Elle s’inscrit dans le prolongement de l’expérimentation de la RE2020 sur la base du référentiel E+C-, lancée en octobre 2016. Après 2 années d’expérimentation, initiative inédite pour associer les parties concernées à la préparation d’une réglementation qu’il faut saluer, l’Etat a engagé la formalisation de la réglementation environnementale 2020 à l’automne 2018.

Il s’agit de répondre aux enjeux de qualité de services aux utilisateurs des bâtiments, en améliorant les équilibres environnementaux et économiques. Pour les utilisateurs, les pré-occupations de la qualité de l’air, de l’acoustique et du confort thermique doivent être mieux traitées en présence d’un climat tendanciellement plus chaud en été. Or les paramétrages de la RT2012 reposent sur des données, notamment météorologiques, de décennies antérieures.

Ensuite, il convient de respecter des engagements pris par la France lors du Grenelle de l’environnement en 2009 et en 2010. La mise en place de bâtiments économes, basse consommation et à énergie positive, ou encore la prise en compte des émissions de gaz à effet de serre en cycle de vie du bâtiment, avaient été prévues à l’échéance de 2020 il y a 10 ans ! Avec l’engagement de la France à respecter l’Accord de Paris, nous savons à présent que la feuille de route de la neutralité carbone pour le secteur de la construction nécessite des progrès considérables non seulement en terme énergétique, mais aussi de carbone embarqué dans les matériaux et équipements de construction. Au-delà du critère incontournable du carbone, d’autres enjeux environnementaux tels que l’eau et l’économie circulaire sont importants.

Comment CINOV participe à cette concertation et quelle est la position de CINOV ?

CINOV participe à la concertation à différents niveaux, qui s’articulent avec le schéma de la préparation de la RE2020. Un Groupe projet RE2020 au sein de la Commission développement durable de CINOV a été mis en place dès le lancement de la préparation de la RE2020 à l’automne 2018. Plusieurs experts membres de CINOV ont contribué à une quinzaine de Groupes de travail et des représentants du Groupe projet prennent part au 4 Groupes de concertation sur la méthode d’évaluation de la performance et des seuils, les données environnementales, la sensibilisation, et sur l’économie. CINOV est également présent aux niveaux du Comité technique de pilotage et siège au CSCEE. Cette participation à tous les niveaux nous permet de mobiliser l’intelligence collective des compétences de représentants de différents syndicats, Ingénierie, mais également GIAc , SYPAA Programmation et TEN Environnement.

Quels sont les enjeux pour les TPE et PME de l’ingénierie ? Les acteurs du BTP ont récemment demandé un report de la réglementation, qu’en pensez-vous ?

Pour nos métiers de la prestation intellectuelle et des bureaux d’études, au-delà des préoccupations antérieures dont le niveau d’exigence est relevé, de nouveaux défis sont présents, tels qu’intégrer les critères carbone, d’eau, d’économie circulaire, d’adaptation au changement climatique ou encore de la biodiversité. Il convient d’insister tout particulièrement sur l’alignement de nos pratiques sur une performance à faible intensité carbone ou neutre en carbone. La réglementation énergétique dispose d’une quarantaine d’année, mais nous ne disposons pas de ce temps là pour progresser pour le critère carbone.

Il est nécessaire de s’engager sans délai dans une montée en compétence en performance carbone en cycle de vie, avec dans un premier temps courant 2020 la mise en place d’une réglementation prévoyant un niveau de seuils modérés, notamment pour le critère EgesPCE, c’est-à-dire sur le carbone embarqué dans les matériaux et produits de construction. Les labels et certification pourront venir en complément afin de valoriser les projets atteignant un plus haut niveau de performance.

A moyen terme, à partir de 2023 les seuils pourraient être ré-évalués au regard du retour d’expérience et de la feuille de route pour la neutralité carbone. L’opportunité d’étendre la démarche à la rénovation du patrimoine bâti existant pourrait également être évaluée à cette échéance.