Préambule

La Fédération CINOV salue la sortie du « guide de préconisations de sécurité sanitaire pour la continuité des activités de la construction » rédigé par l’OPPBTP, regrettant néanmoins de ne pas avoir été associée à l’élaboration de celui-ci.

Aucune des organisations professionnelles représentatives de la maîtrise d’œuvre n’ayant été non plus associée, alors qu’elles représentent des travailleurs du bâtiment à part entière, et que certains de leurs ressortissants sont de surcroit des spécialistes de la gestion des risques, CINOV considère qu’il est inexact de dire que ce guide « a reçu l’agrément des organisations professionnelles et syndicales représentatives du Bâtiment et des Travaux Publics ».

Par ailleurs, CINOV considère que :

  • Ce guide constitue un outil d’aide aux entreprises pour répondre aux obligations du chef entreprise et de la maitrise d’ouvrage pendant la phase de confinement visant à limiter la propagation du coronavirus. Ce guide ne s’applique pas pour la gestion d’autres épidémies, qui nécessiteraient des mesures adaptées.
  • Ce guide ne se substitue pas à l’autorité de l’inspection du travail, de l’INRS ou encore aux recommandations de la CRAM. A titre d’exemple, il circule des courriers de la CRAM demandant à « mettre à disposition de tous les salariés, y compris encadrement, y compris maîtrise d’ouvrage, y compris coordonnateur SPS et maîtrise d’œuvre, des masques anti contamination en quantité suffisante (remplacement toutes les 2 à 4h) et former le personnel à son utilisation ».
  • Ce guide n’a pas vocation à s’appliquer en période transitoire, pendant laquelle la population n’est plus confinée, mais où la propagation du virus est toujours active, des mesures spécifiques devront être définies pour cette période.
  • Ce guide ne s’applique pas en l’absence de propagation d’une épidémie.

Toutes ces précisions devraient être inscrites dans le préambule du guide.

Sur les responsabilités des chefs d’entreprises

CINOV adhère totalement à la première phrase du guide : « la priorité des entreprises du BTP est d’adopter des mesures de prévention protégeant la santé de leurs collaborateurs, conformément aux responsabilités des employeurs ».

CINOV approuve également le fait que « les documents uniques d’évaluation des risques des entreprises doivent être mis à jour pour prendre en compte les préconisations (du guide) » et considère que «la mise en œuvre de ces mesures est une condition incontournable des activités du

BTP, et qu’il appartient à chaque entreprise d’évaluer sa capacité à s’y conformer ». Il en va de même des modes opératoires et autres analyses de risques.

CINOV reprend à son compte la consigne du guide, encadrée en rouge : « Les entreprises doivent respecter strictement les préconisations de ce guide pendant toute la période de confinement décidée par les autorités et, à défaut de pouvoir le faire, stopper leur activité. »

Il est donc essentiel que les consignes édictées dans le guide soient compréhensibles par chacun, et puissent être réellement mises en œuvre.

Sur les objectifs propres aux maîtres d’œuvre, acteurs clés du chantier

Nous soulignons que les maîtres d’œuvre ont deux objectifs principaux :

  • assurer la sécurité de leur personnel, en particulier sur les chantiers
  • veiller à la conformité d’exécution des travaux par rapport aux objectifs contractuels (mission DET/AOR).

Le guide ne traite donc pas de l’implication du maître d’œuvre dans la sécurité des phases provisoires (méthodes d’entreprise) ainsi que sur le contrôle du respect des mesures de sécurité (générales et spécifiques au COVID 19).

Sur les rôles et responsabilités des maîtres d’ouvrage

Il convient de rappeler le rôle particulier du maître d’ouvrage, qui a la responsabilité de mettre en œuvre l’ensemble des mesures de sécurité sur ses chantiers.

Les mesures du guide supposent par ailleurs un avenant aux contrats car, dans une très grande majorité de cas, la mise en œuvre des mesures préconisées impactera l’équilibre économique du chantier ainsi que son organisation et les délais.

A titre d’exemple, il conviendra d’étendre la mission du coordonnateur SPS (nouvelles réunions CISCCT, mises à jour complémentaires du PGC, harmonisation des PPSPS, nouvelles visites d’inspections communes) et notifier le nouveau calendrier établi par l’OPC selon les éléments remis par les entreprises.

Nos propositions pour améliorer le guide

  • Tel qu’il est rédigé, ce guide n’est accessible qu’à des professionnels de la gestion des risques, capables d’en comprendre les préconisations, et surtout capables de les adapter à leur entreprise, et à chaque chantier. Cette mention devrait être précisée en préambule du guide.
  • Les consignes générales et péremptoires qui pourraient faire croire que leur seul respect suffirait à supprimer le risque doivent être évitées. Par exemple la lecture de la consigne suivante « en divisant par deux la capacité nominale d’accueil simultané pour toutes les installations » s’avérera insuffisante, lorsque dans certaines circonstances il faudra diviser cette capacité nominale par 4, ou plus, et dans d’autres cas, elle sera acceptable.
  • Concernant le référent COVID19:
    • Quel est son niveau de compétence pour éclairer l’avis qu’il donne ?
    • Il nous semble important de clarifier les interactions entre les référents COVID19 des entreprises et celui du site, afin de clarifier les responsabilités de chacun.
    • Ne faudrait-il pas missionner un assistant à la maîtrise d’ouvrage, réfèrent Covid19, chargé de coordonner les mesures à mettre en œuvre sur site ?
  • Le contrôle à l’entrée des chantiers nous paraît d’application problématique, voire impossible (nous nous interrogeons sur la possibilité que chaque entreprise s’engage à n’envoyer sur site que des salariés qui ne présenteraient aucun symptôme) :
    • Quid de la compétence, de la légitimité et de la responsabilité du « portier » ?
    • Quid des porteurs asymptomatiques ?
    • Quid de la nécessaire implication de la médecine du travail ?
  • Il nous semble nécessaire d’intégrer dans les processus l’ensemble des acteurs du chantier, et pas uniquement les représentants des entreprises, particulièrement, pour la gestion des entrées sur site, pour l’accès aux sanitaires, …
  • Sur le port du masque, il conviendrait :
    • d’être plus précis sur le fait que des masques doivent être disponibles ou non sur site lorsque son port est nécessaire, et éviter ainsi les « simples  recommandations » : le port est obligatoire selon les recommandations de la CRAM.
    • Tenir compte de la décision du Médecin du travail sur l’aptitude au port du masque.
  • Enfin, le guide tel que rédigé ne traite pas de l’ensemble des risques, et en particulier :
    • Les prestations liées contractuellement au chantier et exécutées en dehors du périmètre du chantier (ex. mesures dans l’environnement),
    • Les trajets (au-delà de la distanciation à l’intérieur du véhicule, d’autres consignes doivent être envisagées).
    • La désinfection des véhicules de société partagés
    • L’évacuation des déchets

La Fédération CINOV réalisera prochainement des analyses qui feront l’objet de notes complémentaires.