L’organisation de la production, l’encombrement du process et l’emplacement des utilités déterminent l’architecture et les dimensions des bâtiments d’un site industriel. Les réseaux des fluides et énergies, optimisés pour limiter les déperditions fatales, assurent les besoins du process et le confort du personnel. La réglementation hygiène – sécurité – environnement impose éventuellement des installations de traitement des rejets air, eau, etc.

Le développement du BIM (Building Information Model) est récent et lié à l’évolution du numérique. Il a trouvé son essor dans les grands projets de construction de bâtiment tertiaire ou d’habitation : les maquettes numériques permettent de gérer toutes les données du building. L’industrie a commencé sa mutation numérique depuis les années 70 avec la CAO et la FAO (Conception/Fabrication Assistée par Ordinateur). Dans les années 80 on était déjà capable de construire et exploiter un modèle numérique du comportement énergétique d’un site industriel, malgré les ressources numériques “modestes” de l’époque. 

Digitaliser un bâtiment industriel est possible, mais le besoin va au-delà. L’industriel s’intéresse aux outils de simulation numérique pour exploiter et optimiser sa production, améliorer la qualité des produits ou intervenir sur la sécurité du fonctionnement. Comment les industriels peuvent s’approprier ces outils, et les faire évoluer pour tenir compte des transformations dans l’usine ? 

Créer un BIM-Industrie est donc plus que de créer une simple application numérique. Il faut la collaboration des spécialistes de métiers différents : en premier l’industriel pour formuler ses besoins, l’électronicien pour connecter l’équipement, le microinformaticien pour gérer les régulations et automatismes, le thermicien pour évaluer l’impact et les interactions énergétiques, le spécialiste process pour assurer l’intégrité. Les adhérents de CINOV INDUSTRIE ont l’habitude de cette approche pour élaborer des solutions pertinentes aux situations complexes. 

Le bâtiment industriel vit au rythme de l’activité qui s’y exerce et pour l’industrie mécanique, par exemple, la chaleur dégagée par le process contribue pour une part importante au chauffage des locaux. Pour une valorisation optimale de cette chaleur, les régulations classiques ne suffisent plus. Ainsi une action pilote dans une usine mécanicienne a eu recours pour le système de régulation à l’apprentissage par réseau neuronaux. Il était alors possible d’anticiper le comportement énergétique de l’atelier avec l’objectif de minimiser la consommation d’énergie par un maximum de récupération de l’énergie fatale. 

La solution numérique industrielle recherchée par les spécialistes de la logistique industrielle, doit permettre de retrouver la production de l’Usine du Futur. Avec les technologies connectées et l’électronique embarquée on sort du schéma classique. Les étapes de production ne sont plus définies lors de la création de la chaîne de production, mais s’organiseront de façon autonome par l’intelligence embarquée dans les éléments du process (exemple : AGV, Automated Guided Vehicule). 

Alors, les coûts de cette numérisation deviennent importants. A cela s’ajoute un manque criant de spécialistes en capacité de répondre aux missions technico-numériques, pour à terme intégrer du savoir-faire au sein de l’usine. 

Certaines entreprises ont commencé leur « numérisation » par des actions simples comme par exemple l’objectif « zéro papier », d’autres ont équipé leurs ateliers de capteurs « connectés ». Globalement, notre industrie a du retard dans la numérisation, mais il n’est pas encore trop tard. Il sera important de refaire le lien générationnel pour construire notre INDUSTRIE DU FUTUR. Les spécialistes qui ont connu l’industrie sont proches de la retraite. Et quid de la sécurité numérique ? Les derniers colloques sur le sujet, n’apportent pas encore de solutions industriellement satisfaisantes. L’effort national en R&D doit être à la hauteur des enjeux – nos emplois et ceux des générations à venir en dépendent. 

Par Martina KOST, Joseph IRANI – B4E